Nantes, le 17 janvier 2019
Sarah El Haïry, députée nantaise, bonne connaisseuse du milieu associatif et de l’économie sociale et solidaire, avait alerté sur les dangers de l’instabilité fiscale dès 2017. Elle a déposé un projet de loi pour faciliter le financement des assos.
Comment expliquez-vous cette baisse des dons, parfois spectaculaire, qui affecte le milieu associatif ?
Par l’instabilité fiscale. J’avais alerté dès décembre 2017. C’était d’ailleurs ma toute première question au gouvernement. La suppression de l’ISF
, le prélèvement à la source et la hausse de la CSG : ces trois réformes touchent beaucoup de monde, notamment les retraités qui sont des donateurs réguliers. À mon sens, il faudra attendre un an pour que tout le monde soit rassuré et ça va repartir.
La générosité est-elle en berne en France ?
Je ne pense pas. J’ai beaucoup consulté ces derniers mois : de grands donateurs, des entreprises, des associations, des fondations. Le problème ce n’est pas que les gens ne veulent plus donner, mais qu’ils ne savent plus comment donner. Il faut inventer une nouvelle philanthropie à la française. La défiscalisation des dons, il ne faut pas voir ça comme la création d’une niche fiscale, mais comme une possibilité d’investissement dans la solidarité nationale. J’ai d’ailleurs fait une proposition de loi qui sera étudiée en mars à l’Assemblée.
Que contient-elle ?
La possibilité pour les associations de se prêter des fonds entre elles, de manière sécurisée. Mais également la faculté de mettre un bien immobilier à disposition des associations lorsque celui-ci a été saisi dans le cadre d’une enquête sur les avoirs criminels. Autre proposition : que les fonds des associations désactivées, qui n’ont pas connu de mouvement depuis dix ans, puissent être réaffectés au milieu associatif, plutôt qu’au pot commun de l’État, comme c’est le cas actuellement. Mais j’ai aussi d’autres idées pour aller plus loin.
C’est-à-dire ?
Aujourd’hui, on ne peut pas faire de don au-delà de 20 % de son impôt sur le revenu pour défiscaliser. Je souhaite qu’on passe à 30 %. Je pense qu’il faudrait également que l’État encourage le micro-don. Vous savez, cette opération qui vous fait arrondir le montant d’un achat de t-shirt ou de places de spectacle, par exemple, au bénéfice d’une œuvre ? Autre suggestion : simplifier les dons pour les très petites entreprises (TPE) et les Petites et moyennes entreprises (PME). Pour l’heure, c’est très compliqué : elles ne doivent pas dépasser 0,5 % de leur chiffre d’affaires. Je pousse plutôt à la fixation d’un plafond de 10 000,00 €, plus facile à mettre en œuvre. C’est important : ces entreprises connaissent bien le tissu associatif de leur territoire, elles savent où il y a des besoins. Enfin, on peut faire beaucoup mieux pour simplifier le don en nature. Notamment le don en énergie, produit par exemple par des panneaux solaires, ou le don d’invendus.
Votre victoire jusque-là ?
Un amendement que j’ai proposé, et qui a été adopté. Il permet aux associations qui héritent d’un bien immobilier de ne plus payer les droits de mutation.